Poème Effroyables Jardins

Photos extraites du film de Jean Becker adaptant le roman de Michel Quint paru en l'an 2000


Une bombe posée détruit un poste d’aiguillage.
les soldats vert-de- gris totalement ivres de rage
Font désigner au hasard d’une rancœur quelques otages
En avertissement, en prémices à un prochain carnage.

Les ombres traversent un des effroyables jardins
Pour y rencontrer un être infiniment humain.
Plutôt que de tirer sur tout ce qui bouge
Le soldat-clown y déambule avec son nez rouge.

Transis et mouillés au fond du cul- de- basse fosse
Ils le voient d’abord comme un cynique qui se gausse.
En leurs lançant quelque pommes et un pain
Il les persuade qu’il est un homme de bien.

Les coupables doivent absolument se dénoncer
Pour tirer de la glaise ceux qui sont enfoncés.
Mais le maître destin est pour le moins comique
Et déroule à cet endroit une intrigue tragique.

Deux des otages sont d’innocents coupables
Et par ce fait réduits au rang d’incapables.
Ils sont ligotés par un lien invisible et fort
Celui que d’aucuns appellent l’ironie du sort.

Les bourreaux ont décidé l’exécution
Le comique troupier refuse la soumission.
Alors dans un geste débordant d’honneur
Il refuse d’être du nombre des tireurs

Une balle termine sa course dans sa tête.
Son sang se mélange aux ruisseaux de pluies
Mettant ainsi fin aux relents de la triste fête
Et ne reste qu’un désespoir couleur de suie .

Le miracle inattendu cependant se produit
Et les otages souillés sortent de la nuit.
Le Maître d’école sans faire plus de manières
Reprend le nez rouge en guise de bannière.

Il fera le pitre pour toujours se souvenir
De cet homme qui réussit à le faire sourire
En ce moment complètement vide d’avenir.
Alors qu’il ne lui restait plus qu’à mourir.

Montfort , le 28/01/2022
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