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Nouvelle Le chagrin de Tassadit

Slimane

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Après avoir claqué la porte derrière elle, Tassadit prit le chemin de la maison de ses parents aveuglée par la colère et pestant intérieurement contre son cousin. Tassadit était une très belle jeune fille. À dix-huit ans, elle avait une silhouette gracieuse et féminine. De grands yeux bruns ardent comme des braises sous des sourcils fins et relevés. Son visage charmant et délicat contrastait avec les traits épais et empâtés de sa mère et ceux, crispés et anguleux de son père. Ce dont elle était le plus fière, c’était de sa longue et abondante chevelure de jais qui s’épandait sur ses épaules telle une cascade lumineuse lorsqu’elle dénouait son foulard. Un foulard qu’elle portait religieusement en dehors de la maison.

Tassadit se souvient encore de leurs jeunesses réciproques. Idir lui répétait souvent qu’elle était belle et qu’un jour, lorsqu’ils seront en âge de se marier, elle deviendrait sa femme. Depuis ce temps, elle s’était nourrie d’illusions dans l’espoir qu’il tienne sa promesse. Et puis, les années se sont écoulées. Plus ils grandissaient et plus il s’éloignait d’elle. Ce fut d’abord l’école qui les sépara. Idir étudiait au Collège de Fort National, ensuite il entra comme interne au lycée de Tizi Ouzou. Mais quand Bélaid partit en Russie pour poursuivre ses études supérieures, Idir s’était replié sur lui-même et se détacha totalement de sa cousine, en l’évitant chaque fois qu’elle se trouvait chez sa tante Na El Djouher. Aujourd’hui, Tassadit se sent trahie par son cousin avec la certitude qu’elle n’était pour lui qu’un pur fantasme de jeunesse.

Contrairement à son frère Bélaïd et son cousin Idir, elle n’eut jamais le privilège de poursuivre ses études. Son père était la cause de son analphabétisme lorsqu’il décida, qu’à l’âge de huit ans elle ne fréquenterait plus l’école. Étant une fille, son devoir était de rester à la maison, d’aider sa mère dans les tâches ménagères et d’apprendre un métier qui lui servirait une fois mariée. Passionnée des costumes traditionnels de son pays, Tassadit s’initia à l’art de la couture et de la broderie avec une remarquable passion pour la robe kabyle qu’elle créait avec une exceptionnelle dextérité manuelle, méritant les éloges de sa famille et de ses amies.

Elle passa toute son adolescence à rêver et à fantasmer d’un mariage avec Idir. Elle nourrissait de nobles sentiments qui venaient souvent colorer ses premiers émois amoureux. Les années d’enfance et d’adolescence qu’elle avait passées avec lui, ainsi que ce lien de sang qui l’unissait à son cousin, l’incitaient à penser que Idir n’appartiendrait à aucune autre femme à part elle.
Elle se souvient de la joie extrême et contagieuse qui avait régné dans la maison de sa tante ce matin-là, quand celle-ci lui avait annoncé l’arrivée de pour quelques jours de vacances. Le cœur de Tassadit avait palpité d’amour et de plaisir. Juste à l’idée de le revoir, elle avait l’impression de flotter dans un nuage, incapable de se concentrer sur ses travaux quotidiens. Elle baignait dans une palpable atmosphère de douce euphorie. Elle s’était réveillée au chant du coq afin d’aider sa tante dans les divers préparatifs de la maison. Elle avait même fait le gâteau à la mousse au chocolat dont Idir raffolait, et qu’il trouvait savoureux chaque fois qu’il le mangeait.
Aujourd’hui, elle pleure toutes les larmes de son cœur. Ce cœur meurtri et déchiré par l’affreux chagrin et la terrible nouvelle semblable au fracas d’un effroyable tonnerre.
Sa journée de bonheur avait viré au cauchemar.


Tassadit réalisa soudain que son espoir d’être un jour la femme de Idir s’était brusquement envolé en fumée. Il est vrai que des rumeurs circulaient dans le village faisant état que Idir fréquentait une étudiante à l’université. Que cette étudiante n’était pas une algérienne mais une étrangère. Des ragots circulaient à leur sujet. Les gens ébruitaient qu’ils les voyaient souvent ensemble dans les cafés, les restaurants ou marchant simplement main dans la main un peu partout dans la ville. Ils colportaient qu’ils étaient presque inséparables, exposés à la dérision de leurs camarades de la faculté, et à la suspicion généralisée que Idir envisagerait de l’épouser. Tassadit n’y croyait pas, et ne voulait surtout pas accorder de l’importance à ces racontars, car son amour pour Idir masquait tout raisonnement logique dans son esprit.

Elle ne voulait pas le croire, et pourtant elle ne pouvait démentir l’évidence des faits et l’incontestabilité de la réalité telle qu’elle se présentait en ce moment, et qui lui rappelaient sans cesse que Idir allait épouser cette fille. Les temps précieux d’un rêve merveilleux, mais de joies éphémères, et la voilà aujourd’hui propulsée dans la réalité d’une odieuse et cruelle trahison, voulant que Idir épouse cette étrangère ! Juste à l’idée d’y penser, elle éclata en gros sanglots douloureux qu’elle ne pouvait retenir et dont les hoquets secouaient tout son corps. Elle poussa violemment la porte de la maison et entra en trombe dans sa chambre.

Voyant Tassadit sangloter à fondre l’âme, sa mère Na Ouiza, qui était dans la cuisine en train de préparer le souper du soir avant l’arrivée de son mari, laissa tout tomber et alla rejoindre rapidement sa fille. La voyant dans cet état, elle qui ne pleurait jamais ou avec retenue, sa mère comprit très vite que Tassadit venait d’apprendre une mauvaise nouvelle. Elle se précipita vers elle et l’a prise dans ses bras de crainte qu’il ne lui arrive un malheur.

— Qu’as-tu ? qu’as-tu ma fille ? Dhelkhir, dhelkhir Inchallah ! lui dit-elle en la secouant
vigoureusement.


Tassadit continuait de sangloter amèrement, le visage enfoui dans le giron de sa mère pendant que Na Ouiza lui caressait le dos afin d’apaiser sa souffrance et d’alléger le poids de l’affliction qui comprimait sa poitrine.

— C’est à cause de Idir, n’est-ce pas ? Comme tout le monde, j’ai appris la nouvelle qu’il est venu chez sa mère accompagné d’une étrangère !

Sa fille ne répondit pas, mais d’un mouvement brusque, elle releva la tête et fixa intensément sa mère avec une expression de désespoir et de douleur. Na Ouiza poussa un long soupir de regret et de tristesse, posa sur sa fille un regard attendrissant et bienveillant, et lui dit tendrement :

— Je t’avais pourtant prévenue ma fille. Je t’avais bien dit que ce garçon ne m’inspirait pas confiance. Depuis son départ pour Alger, il ne donnait plus de ses nouvelles. Je pressentais qu’il y avait anguille sous roche.


Tassadit se remit à pleurer de plus belle. Ce n’est pas ce qu’elle voulait entendre, mais la réalité est telle qu’elle ne pouvait la nier. Sa mère la prémunissait souvent contre l’illusion de l’amour qu’elle nourrissait envers Idir.

— Oh, ne crains rien ma fille ! Il va très vite s’apercevoir qu’il est tombé sur des figues de barbarie, et que les épines vont lui rester en travers de la gorge. Allons ma fille ! Calme-toi et cesse de pleurer. Il ne mérite pas que tu verses des larmes pour lui, consola-t-elle tant bien que mal. Celui qui est aveuglé par le soleil ne sait pas distinguer la couleur du ciel ! Va te laver le visage… et viens dresser la table pendant que je termine de préparer le souper. Ton père ne va pas tarder à rentrer.


Tandis que Tassadit prit le chemin de la salle de bain, Na Ouiza murmura d’une voix presque inaudible : je savais depuis toujours que ce garçon ne me plaisait pas. Pour qui se prend-t-il aujourd’hui pour oser faire souffrir ma fille !

À vrai dire, ce n’était pas envers Idir que Na Ouiza avait une aversion, mais c’était sa secrète jalousie envers Na El Djouher qu’elle nourrissait de longue date, et qui remontait à la surface semblable à l’épave d’un bateau échoué au fond de l’océan. Elle n’oubliera jamais la vaine, mais complaisante tentative de son mari de l’avoir voulu comme seconde épouse après le décès de Meziane. Il est vrai qu’elle ne pouvait pas nier la beauté fatale et éclatante de Na El Djouher, et le fait qu’elle paraissait plus jeune que son âge. Rien qu’à y penser, elle fut prise d’un douloureux serrement de cœur. Depuis ce fallacieux évènement et ce souvenir qui émanait d’un passé lointain, elle était contrainte de se dire que celui qui a été mordu par un serpent craint la corde. En dépit de son indifférence soutenue, Na Ouiza considérait encore Na El Djouher comme une redoutable rivale malgré toutes ces années écoulées.

Finalement, les deux époux retournèrent chez eux. Mokrane soulagé d’avoir apostrophé vivement Na El Djouher à propos de son fils, et Na Ouiza, d’avoir ôter une épine du pied en poussant son mari de remettre les pendules à l’heure avec sa belle-sœur. Pendant ce temps, Tassadit qui avait dressé la table du souper, attendait que ses parents s’installent pour servir. On voyait bien que chacun se forcer à manger, sauf Tassadit, dont l’appétit avait été coupé depuis l’évènement tragique de cet après-midi. Son père remarqua l’attitude inhabituelle de sa fille, mais il s’était abstenu de demander des explications, afin de ne pas la mettre mal à l’aise. Il se contenta de regarder sa femme qui lui répondit d’un regard en coin, soulignant qu’elle lui parlerait plus tard.

Après avoir débarrassé la table et rangé la cuisine, Tassadit regagna sa chambre dépourvue de toute envie de dormir. Elle avait le cœur gros et l’âme en peine. Elle resta assise sur son lit dans un profond et morne accablement. Elle pressentait une lourde boule au fond de la gorge prête à fondre en larmes. Depuis la terrible nouvelle, elle avait l’impression d’étouffer, car ces affreux souvenirs oppressaient sa poitrine. Et c’est en se remémorant toute la scène de ce cauchemardesque après-midi — depuis l’arrivée en taxi de Idir jusqu’au triste souper de ce soir, en passant par la colère de son père et l’animosité de sa mère envers sa tante — qu’elle s’est effondrée en pleurs, avec l’effroyable perspective que son bonheur ait été maintenant confisqué par une autre femme. Bien que la lune brille toutes les nuits dans le ciel, ce soir-là tout semblait avoir changé. Son rêve s’éteignait telle une flamme exposée à un glacial vent du nord.

(Un Extrait de mon roman, entamé en écriture à 04 mains, en voie de finition que j'ai voulu partager avec vous amis Jepoémiens)
 
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Après avoir claqué la porte derrière elle, Tassadit prit le chemin de la maison de ses parents aveuglée par la colère et pestant intérieurement contre son cousin. Tassadit était une très belle jeune fille. À dix-huit ans, elle avait une silhouette gracieuse et féminine. De grands yeux bruns ardent comme des braises sous des sourcils fins et relevés. Son visage charmant et délicat contrastait avec les traits épais et empâtés de sa mère et ceux, crispés et anguleux de son père. Ce dont elle était le plus fière, c’était de sa longue et abondante chevelure de jais qui s’épandait sur ses épaules telle une cascade lumineuse lorsqu’elle dénouait son foulard. Un foulard qu’elle portait religieusement en dehors de la maison.

Tassadit se souvient encore de leurs jeunesses réciproques. Idir lui répétait souvent qu’elle était belle et qu’un jour, lorsqu’ils seront en âge de se marier, elle deviendrait sa femme. Depuis ce temps, elle s’était nourrie d’illusions dans l’espoir qu’il tienne sa promesse. Et puis, les années se sont écoulées. Plus ils grandissaient et plus il s’éloignait d’elle. Ce fut d’abord l’école qui les sépara. Idir étudiait au Collège de Fort National, ensuite il entra comme interne au lycée de Tizi Ouzou. Mais quand Bélaid partit en Russie pour poursuivre ses études supérieures, Idir s’était replié sur lui-même et se détacha totalement de sa cousine, en l’évitant chaque fois qu’elle se trouvait chez sa tante Na El Djouher. Aujourd’hui, Tassadit se sent trahie par son cousin avec la certitude qu’elle n’était pour lui qu’un pur fantasme de jeunesse.

Contrairement à son frère Bélaïd et son cousin Idir, elle n’eut jamais le privilège de poursuivre ses études. Son père était la cause de son analphabétisme lorsqu’il décida, qu’à l’âge de huit ans elle ne fréquenterait plus l’école. Étant une fille, son devoir était de rester à la maison, d’aider sa mère dans les tâches ménagères et d’apprendre un métier qui lui servirait une fois mariée. Passionnée des costumes traditionnels de son pays, Tassadit s’initia à l’art de la couture et de la broderie avec une remarquable passion pour la robe kabyle qu’elle créait avec une exceptionnelle dextérité manuelle, méritant les éloges de sa famille et de ses amies.


Elle passa toute son adolescence à rêver et à fantasmer d’un mariage avec Idir. Elle nourrissait de nobles sentiments qui venaient souvent colorer ses premiers émois amoureux. Les années d’enfance et d’adolescence qu’elle avait passées avec lui, ainsi que ce lien de sang qui l’unissait à son cousin, l’incitaient à penser que Idir n’appartiendrait à aucune autre femme à part elle.
Elle se souvient de la joie extrême et contagieuse qui avait régné dans la maison de sa tante ce matin-là, quand celle-ci lui avait annoncé l’arrivée de pour quelques jours de vacances. Le cœur de Tassadit avait palpité d’amour et de plaisir. Juste à l’idée de le revoir, elle avait l’impression de flotter dans un nuage, incapable de se concentrer sur ses travaux quotidiens. Elle baignait dans une palpable atmosphère de douce euphorie. Elle s’était réveillée au chant du coq afin d’aider sa tante dans les divers préparatifs de la maison. Elle avait même fait le gâteau à la mousse au chocolat dont Idir raffolait, et qu’il trouvait savoureux chaque fois qu’il le mangeait.
Aujourd’hui, elle pleure toutes les larmes de son cœur. Ce cœur meurtri et déchiré par l’affreux chagrin et la terrible nouvelle semblable au fracas d’un effroyable tonnerre.
Sa journée de bonheur avait viré au cauchemar.

Tassadit réalisa soudain que son espoir d’être un jour la femme de Idir s’était brusquement envolé en fumée. Il est vrai que des rumeurs circulaient dans le village faisant état que Idir fréquentait une étudiante à l’université. Que cette étudiante n’était pas une algérienne mais une étrangère. Des ragots circulaient à leur sujet. Les gens ébruitaient qu’ils les voyaient souvent ensemble dans les cafés, les restaurants ou marchant simplement main dans la main un peu partout dans la ville. Ils colportaient qu’ils étaient presque inséparables, exposés à la dérision de leurs camarades de la faculté, et à la suspicion généralisée que Idir envisagerait de l’épouser. Tassadit n’y croyait pas, et ne voulait surtout pas accorder de l’importance à ces racontars, car son amour pour Idir masquait tout raisonnement logique dans son esprit.

Elle ne voulait pas le croire, et pourtant elle ne pouvait démentir l’évidence des faits et l’incontestabilité de la réalité telle qu’elle se présentait en ce moment, et qui lui rappelaient sans cesse que Idir allait épouser cette fille. Les temps précieux d’un rêve merveilleux, mais de joies éphémères, et la voilà aujourd’hui propulsée dans la réalité d’une odieuse et cruelle trahison, voulant que Idir épouse cette étrangère ! Juste à l’idée d’y penser, elle éclata en gros sanglots douloureux qu’elle ne pouvait retenir et dont les hoquets secouaient tout son corps. Elle poussa violemment la porte de la maison et entra en trombe dans sa chambre.

Voyant Tassadit sangloter à fondre l’âme, sa mère Na Ouiza, qui était dans la cuisine en train de préparer le souper du soir avant l’arrivée de son mari, laissa tout tomber et alla rejoindre rapidement sa fille. La voyant dans cet état, elle qui ne pleurait jamais ou avec retenue, sa mère comprit très vite que Tassadit venait d’apprendre une mauvaise nouvelle. Elle se précipita vers elle et l’a prise dans ses bras de crainte qu’il ne lui arrive un malheur.

— Qu’as-tu ? qu’as-tu ma fille ? Dhelkhir, dhelkhir Inchallah ! lui dit-elle en la secouant
vigoureusement.

Tassadit continuait de sangloter amèrement, le visage enfoui dans le giron de sa mère pendant que Na Ouiza lui caressait le dos afin d’apaiser sa souffrance et d’alléger le poids de l’affliction qui comprimait sa poitrine.

— C’est à cause de Idir, n’est-ce pas ? Comme tout le monde, j’ai appris la nouvelle qu’il est venu chez sa mère accompagné d’une étrangère !

Sa fille ne répondit pas, mais d’un mouvement brusque, elle releva la tête et fixa intensément sa mère avec une expression de désespoir et de douleur. Na Ouiza poussa un long soupir de regret et de tristesse, posa sur sa fille un regard attendrissant et bienveillant, et lui dit tendrement :

— Je t’avais pourtant prévenue ma fille. Je t’avais bien dit que ce garçon ne m’inspirait pas confiance. Depuis son départ pour Alger, il ne donnait plus de ses nouvelles. Je pressentais qu’il y avait anguille sous roche.


Tassadit se remit à pleurer de plus belle. Ce n’est pas ce qu’elle voulait entendre, mais la réalité est telle qu’elle ne pouvait la nier. Sa mère la prémunissait souvent contre l’illusion de l’amour qu’elle nourrissait envers Idir.

— Oh, ne crains rien ma fille ! Il va très vite s’apercevoir qu’il est tombé sur des figues de barbarie, et que les épines vont lui rester en travers de la gorge. Allons ma fille ! Calme-toi et cesse de pleurer. Il ne mérite pas que tu verses des larmes pour lui, consola-t-elle tant bien que mal. Celui qui est aveuglé par le soleil ne sait pas distinguer la couleur du ciel ! Va te laver le visage… et viens dresser la table pendant que je termine de préparer le souper. Ton père ne va pas tarder à rentrer.

Tandis que Tassadit prit le chemin de la salle de bain, Na Ouiza murmura d’une voix presque inaudible : je savais depuis toujours que ce garçon ne me plaisait pas. Pour qui se prend-t-il aujourd’hui pour oser faire souffrir ma fille !

À vrai dire, ce n’était pas envers Idir que Na Ouiza avait une aversion, mais c’était sa secrète jalousie envers Na El Djouher qu’elle nourrissait de longue date, et qui remontait à la surface semblable à l’épave d’un bateau échoué au fond de l’océan. Elle n’oubliera jamais la vaine, mais complaisante tentative de son mari de l’avoir voulu comme seconde épouse après le décès de Meziane. Il est vrai qu’elle ne pouvait pas nier la beauté fatale et éclatante de Na El Djouher, et le fait qu’elle paraissait plus jeune que son âge. Rien qu’à y penser, elle fut prise d’un douloureux serrement de cœur. Depuis ce fallacieux évènement et ce souvenir qui émanait d’un passé lointain, elle était contrainte de se dire que celui qui a été mordu par un serpent craint la corde. En dépit de son indifférence soutenue, Na Ouiza considérait encore Na El Djouher comme une redoutable rivale malgré toutes ces années écoulées.

Finalement, les deux époux retournèrent chez eux. Mokrane soulagé d’avoir apostrophé vivement Na El Djouher à propos de son fils, et Na Ouiza, d’avoir ôter une épine du pied en poussant son mari de remettre les pendules à l’heure avec sa belle-sœur. Pendant ce temps, Tassadit qui avait dressé la table du souper, attendait que ses parents s’installent pour servir. On voyait bien que chacun se forcer à manger, sauf Tassadit, dont l’appétit avait été coupé depuis l’évènement tragique de cet après-midi. Son père remarqua l’attitude inhabituelle de sa fille, mais il s’était abstenu de demander des explications, afin de ne pas la mettre mal à l’aise. Il se contenta de regarder sa femme qui lui répondit d’un regard en coin, soulignant qu’elle lui parlerait plus tard.

Après avoir débarrassé la table et rangé la cuisine, Tassadit regagna sa chambre dépourvue de toute envie de dormir. Elle avait le cœur gros et l’âme en peine. Elle resta assise sur son lit dans un profond et morne accablement. Elle pressentait une lourde boule au fond de la gorge prête à fondre en larmes. Depuis la terrible nouvelle, elle avait l’impression d’étouffer, car ces affreux souvenirs oppressaient sa poitrine. Et c’est en se remémorant toute la scène de ce cauchemardesque après-midi — depuis l’arrivée en taxi de Idir jusqu’au triste souper de ce soir, en passant par la colère de son père et l’animosité de sa mère envers sa tante — qu’elle s’est effondrée en pleurs, avec l’effroyable perspective que son bonheur ait été maintenant confisqué par une autre femme. Bien que la lune brille toutes les nuits dans le ciel, ce soir-là tout semblait avoir changé. Son rêve s’éteignait telle une flamme exposée à un glacial vent du nord.

(Un Extrait de mon roman en voie de finition que j'ai voulu partager avec vous amis Jepoémiens)
Merci pour cet extrait qui est vraiment bien écrit et..... La suite la suite
Amicalement
Gaby
 

Slimane

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#5
Merci pour cet extrait qui est vraiment bien écrit et..... La suite la suite
Amicalement
Gaby
Je te remercie Gaby pour ta lecture. Et pour l'appréciation aussi.
C'est un roman qui me tient à cœur, et que, une fois achevé je vous tiendrai au courant.
Bonne soirée.
 
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#8
.
Très plaisant à lire ...
envie de connaitre très vite la suite
Belle et heureuse année 2021 avec l'aboutissement de ce beau roman
Amitiés soleil
Z. :)
 

Slimane

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#9
.
Très plaisant à lire ...
envie de connaitre très vite la suite
Belle et heureuse année 2021 avec l'aboutissement de ce beau roman
Amitiés soleil
Z. :)
Merci pour la lecture et l'appréciation
Bonne et heureuse année.
Belle fin de soirée.
 

Saoirse

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#10
Belle lecture on a envie d'en savoir plus effectivement. Outre l'histoire et l'écriture j'y trouve un intérêt sociologique, je découvre une culture qui m'est étrangère, même les noms sont dépaysants.
Il faut continuer et achever ce beau roman, se mettre en quête d'un éditeur, qu'il soit sur toutes les plages l'été prochain :)
 

Slimane

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#11
Belle lecture on a envie d'en savoir plus effectivement. Outre l'histoire et l'écriture j'y trouve un intérêt sociologique, je découvre une culture qui m'est étrangère, même les noms sont dépaysants.
Il faut continuer et achever ce beau roman, se mettre en quête d'un éditeur, qu'il soit sur toutes les plages l'été prochain :)
Belle matinée Saoirse.
Je te remercie pour la peine prise pour la lecture ainsi que pour ton commentaire fort encourageant.
Belle journée, même si le soleil aujourd'hui hésite encore à être au rendez- vous.
 

CLARI

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#13
Merci pour ce bel extrait.
Tous mes encouragements pour mener à bien ce beau roman.
Amicalement
 
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