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Ensemble, c'est tout
(A Anna Gavalda)
C'est vrai qu'elle n'avait pas le port d'une reine
Dans son col roulé noir où s'enfonçait ses yeux,
Des yeux noirs, eux aussi, qui larmoyaient sa peine
Entre petits boulots et bout de lit miteux.
Il faisait le cuistot, de l'aube à la nuit sombre,
Trimait sur les réchauds de fièvre et de sueur
Puis tombait, épuisé, comme un radeau qui sombre
Sous le poids d'une vie qui n'avait plus de lueur !
L'un et l'autre passaient, si loin d'une rencontre...
Il ne se plaignait pas, elle non plus d'ailleurs,
Et le temps souterrain qui rapproche les cœurs,
Tissant dans le secret son dessein, là, tout contre,
Préparait pour ces deux écartelés de l'ombre
Un désir, un soupçon imprévu de bonheur...
Le lundi, son seul jour de repos, il allait
Rendre visite à celle, ardente de sourires,
Qui n'espérait que lui, dont l'âme se mêlait
A son ton cabochard habitué au pire !
Elle vivait pour lui, Mamie, qui l'éleva
Lorsque ses deux parents fuyaient toute famille.
Il lui confiait tourments et idylles sans joie,
Ivre dans ses soirées perdues au bras des filles...
Elle avait attrapé la crève et grelottait
Dans le réduit glacial de sa soupente triste,
La belle aux cheveux noirs, ses doigts emmitouflés,
Qui toussait dans le soir, si obscur et sinistre !
Un voisin, Philibert, prit soin d'elle et, chez lui,
Veilla sur l'indigente avec des mots gentils.
Deux êtres différents, peu à peu, s'apprivoisent.
Puisque les petits riens germent de beaux moments,
Elle sût, patiemment, effacer sur l'ardoise
Des jours, sa beuverie et ses emportements.
Tout son corps reprenait la force de construire.
Philibert, son ami fidèle et bégayant,
Était là, plein d'humour théâtral. Le rire
N'est-il pas synonyme, aussi, d'éveillement ?
Elle donnait à tous, de son temps, à Mamie,
A ces êtres nouveaux qui gravitaient soudain
Autour d'elle, emplissant le vide de sa vie
D'amour et d'amitié qui lui faisaient du bien.
Seuls au monde, on est rien, mais tous ensemble, on s'aime !
Être tout pour un autre, et le monde est poème....
(A Anna Gavalda)
C'est vrai qu'elle n'avait pas le port d'une reine
Dans son col roulé noir où s'enfonçait ses yeux,
Des yeux noirs, eux aussi, qui larmoyaient sa peine
Entre petits boulots et bout de lit miteux.
Il faisait le cuistot, de l'aube à la nuit sombre,
Trimait sur les réchauds de fièvre et de sueur
Puis tombait, épuisé, comme un radeau qui sombre
Sous le poids d'une vie qui n'avait plus de lueur !
L'un et l'autre passaient, si loin d'une rencontre...
Il ne se plaignait pas, elle non plus d'ailleurs,
Et le temps souterrain qui rapproche les cœurs,
Tissant dans le secret son dessein, là, tout contre,
Préparait pour ces deux écartelés de l'ombre
Un désir, un soupçon imprévu de bonheur...
Le lundi, son seul jour de repos, il allait
Rendre visite à celle, ardente de sourires,
Qui n'espérait que lui, dont l'âme se mêlait
A son ton cabochard habitué au pire !
Elle vivait pour lui, Mamie, qui l'éleva
Lorsque ses deux parents fuyaient toute famille.
Il lui confiait tourments et idylles sans joie,
Ivre dans ses soirées perdues au bras des filles...
Elle avait attrapé la crève et grelottait
Dans le réduit glacial de sa soupente triste,
La belle aux cheveux noirs, ses doigts emmitouflés,
Qui toussait dans le soir, si obscur et sinistre !
Un voisin, Philibert, prit soin d'elle et, chez lui,
Veilla sur l'indigente avec des mots gentils.
Deux êtres différents, peu à peu, s'apprivoisent.
Puisque les petits riens germent de beaux moments,
Elle sût, patiemment, effacer sur l'ardoise
Des jours, sa beuverie et ses emportements.
Tout son corps reprenait la force de construire.
Philibert, son ami fidèle et bégayant,
Était là, plein d'humour théâtral. Le rire
N'est-il pas synonyme, aussi, d'éveillement ?
Elle donnait à tous, de son temps, à Mamie,
A ces êtres nouveaux qui gravitaient soudain
Autour d'elle, emplissant le vide de sa vie
D'amour et d'amitié qui lui faisaient du bien.
Seuls au monde, on est rien, mais tous ensemble, on s'aime !
Être tout pour un autre, et le monde est poème....