Hors ligne
L’antique horloge s’agrippe au mur fatigué
Sa rythmique a cédé rompue de lassitude
Elle ne sonnera plus les heures fatidiques
Où le jour et la nuit se rejoignent et se quittent
L’escalier en spirale se hisse jusqu’au grenier
égrène ses marches flottantes en dominos dansants
Le fauteuil à bascule ne bat plus la mesure
Ses bras tout poussiéreux n’enlacent que le vide
Ici plus rien ne tient désormais vraiment droit
Tout grince craque se rétracte se défait et se salit
Le temps fait son œuvre avec acharnement
Les volets s’en balancent ils battent dans le vent
qui joue avec l’ombre fine d’un rideau tremblotant
On croirait voir passer dans le miroir terni
Le flouté improbable d’un regard éperdu
Fugace apparition dans un jeu de reflets
Et dans les grands lits froids grelottent les draps jaunis
Qui ont goûté mille fois aux désirs des amants
Un petit froufrou d’ailes va d’une poutre à l’autre
Serait-ce un frisson d’âme ? serait-ce une hirondelle ?
L’araignée se tricote un petit paradis
Autour du candélabre au bronze dépoli
La maison s’abandonne aux caprices des saisons
On dirait une vieille dos courbé par les ans
Elle s’endort au sommet d’un sentier oublié
Le toit tout détuilé offre son flanc moussu
Aux nouvelles nichées et aux cordées de lierre
C’est un châle troué sur des épaules nues
Elle attend qu’on revienne se languit de nos rires
Elle n’a plus d’âge plus de nom l’histoire est en suspens
Et seule la mémoire lui tient lieu d’ossature