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Nouvelle Le Vitrail du p’tit Jésus [1/2]

Peniculo

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#1
Le Vitrail du p’tit Jésus [1/2]

Bien que le clocher ne soit pas tout à fait droit, l’église de ce village construite au XVème siècle et fort bien entretenue, était vraiment très jolie avec son promenoir, son presbytère couvert de lierre et sa grande cour descendant en pente douce vers la rivière. Cette cour, avec sa perspective sur le pont de fer forgé, servait de cadre à toutes les photos de mariage dès la belle saison.

Trois particularités rendaient cette église célèbre.
D’abord sa couverture très travaillée, à laquelle les ardoises bleutées et les soulèvements de toit décalés donnaient une étonnante impression de volume.
C’était une toiture unique réalisée par un couvreur qui avait fait le vœu d’y mettre tout son art. A la suite d’une chute qui aurait du le tuer, il ne fut que légèrement blessé. Considérant qu’il devait la vie à la divine mansuétude il réalisa une charpente incomparable ne comptant ni ses heures, ni sa fatigue.
Le maire du village était très fier de recevoir régulièrement des demandes d’élèves de plusieurs écoles d’architecture pour visiter le village.
Bien entendu, les étudiants venaient surtout pour dessiner et photographier l’église sous tous ses angles après s’être promenés, tète baissée, sous les poutres enchevêtrées du clocher.

Ensuite le fait que des faucons pèlerins aient élu domicile sur la face sud du clocher avait réjoui les superstitieux et les écologistes. Certains disaient que ces oiseaux porteraient bonheur au village tant qu’ils logeraient dans le clocher.
D’autres venaient en curieux, on les voyait, munis d’appareils photographiques allongés de téléobjectifs monstrueux, traquer les moindres mouvements de ces rapaces élégants, au vol silencieux et nonchalant, attendant de fondre sur toute proie digne de leur appétit.

Enfin la curiosité principale était le ʺvitrail du petit Jésusʺ qui, curieusement, représentait Sainte Solange, vierge et martyre, patronne du Berry, en prière avant d’être décapitée, mais le petit Jésus ne figurait pas sur ce magnifique vitrail monté au plomb et qui paraissait neuf tant les pavés de verre étaient lumineux et les joints de plomb propres et brillants.

J’essayais de me renseigner pour connaitre l’origine du nom du vitrail qui, en fait, n’avait rien à voir avec ce qu’il représentait et l’historique de son apparition dans l’église.
En effet si l’église avait été terminée environ en 1620, ce vitrail avait été posé en 1771 ; l’année était gravée sur une des colonnes de l’église faisant face au vitrail et l’inscription :
ʺMDCCLXXI DEUS FECITʺ signifiait bizarrement : Dieu le fit en 1771.

Des personnes interrogées, aucune ne sut me répondre mais toutes, sans exception, me dirent d’aller voir le Curé de la paroisse, petit saint local, charitable, disponible et très actif et qui, érudit, parlant le grec et le latin était de plus féru d’histoire.

Ah ! Quel brave curé. En échangeant une poignée de main il ne vous disait pas bonjour mais « Que Dieu vous garde car seul Il le peut et moi je vais vous bénir, c’est dans mes cordes et ça ne peut vous être que bénéfique ».
Il émanait de lui une bonté, une attention telles qu’on se sentait important à ses yeux.
J’étais entré dans l’église après la fin de sa première messe et il m’avait vu arriver, me signant après avoir pris de l’eau au bénitier et faisant une génuflexion devant l’autel de Saint Joseph ou brillait une lampe rouge indiquant la présence du Saint Sacrement.
Il m’analysa très vite. Vous êtes catholique, vous croyez en Dieu mais vous êtes loin d’être un pratiquant assidu. Vous n’irez pas en enfer pour si peu ; mais, la messe, mon fils, même si elle semble parfois ennuyeuse est toujours une occasion de regarder en soi-même face à son Créateur.
Il changea de conversation aussitôt : je ne pense pas que vous veniez me voir pour un cours d’instruction religieuse ; que puis-je faire pour vous ?
Monsieur Le Curé pourriez vous me raconter l’histoire du vitrail du P’tit Jésus ? Je vous sais occupé sur plusieurs paroisses aussi je vous invite à déjeuner ou diner avec moi, quand il vous
plaira, pour que nous puissions en parler au calme.
Je dus insister un peu pour qu’il accepte de diner avec moi le lendemain soir.

La ʺSonnerie de Corʺ était un restaurant petit mais confortable où la table avait une excellente réputation et où, en période de chasse, le gibier le mieux cuisiné de la région ainsi que les qualités de saucier du chef attiraient les gourmets et les gourmands.

Le brave curé n’avait pas d’habitude gastronomique ; il but un verre de Sancerre en apéritif et continua à l’eau. Pour les plats, Il était curieux de tout et voulant gouter à des mets variés, nous décidâmes de commander des plats différents que nous partagerions. Nous choisîmes donc quatre demi-plats pour notre plus grande satisfaction.
Au moment du bénédicité le prêtre plein d’humour transforma sa prière traditionnelle en y ajoutant à voix basse : ʺet soyez encore plus remercié, Mon Dieu, pour ce délicieux débordement de mon ordinaireʺ.
Appréciant notre diner nous parlions peu, mais avant le fromage le sympathique ecclésiastique commença son récit.

Ce n’est pas l’histoire du vitrail que je vais vous raconter mais plutôt sa légende. Elle est invérifiable mêlant des faits historiques à leur transmission orale évoluant de siècle en siècle.
Le récit prétend mettre en jeu un miracle que l’Eglise ne saurait reconnaitre mais qui est la cause d’une superstition bien assise dans l’esprit des gens de la région.

Lors de la construction de l’église on chargea un maître-verrier et ses élèves de la réalisation des vitraux.
A l’époque on taillait les verres colorés dans la masse, sur place, et on réalisait un dessin monté au plomb fondu sur un châssis que l’on plaçait dans la fenêtre correspondante.

On passait donc d’un dessin à un puzzle qui assemblé pouvait être fixé. Les pièces du puzzle étaient longues à préparer, la forme, la couleur, l’exposition à la lumière et la brillance jouaient un rôle essentiel dans la beauté du dessin.


à suivre
 

marinette

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#2
J'attends la suite avec impatience...

Les vitraux des églises ont tellement de belles histoires à nous raconter !

Amitiés
 
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#3
Le Vitrail du p’tit Jésus [1/2]

Bien que le clocher ne soit pas tout à fait droit, l’église de ce village construite au XVème siècle et fort bien entretenue, était vraiment très jolie avec son promenoir, son presbytère couvert de lierre et sa grande cour descendant en pente douce vers la rivière. Cette cour, avec sa perspective sur le pont de fer forgé, servait de cadre à toutes les photos de mariage dès la belle saison.

Trois particularités rendaient cette église célèbre.
D’abord sa couverture très travaillée, à laquelle les ardoises bleutées et les soulèvements de toit décalés donnaient une étonnante impression de volume.
C’était une toiture unique réalisée par un couvreur qui avait fait le vœu d’y mettre tout son art. A la suite d’une chute qui aurait du le tuer, il ne fut que légèrement blessé. Considérant qu’il devait la vie à la divine mansuétude il réalisa une charpente incomparable ne comptant ni ses heures, ni sa fatigue.
Le maire du village était très fier de recevoir régulièrement des demandes d’élèves de plusieurs écoles d’architecture pour visiter le village.
Bien entendu, les étudiants venaient surtout pour dessiner et photographier l’église sous tous ses angles après s’être promenés, tète baissée, sous les poutres enchevêtrées du clocher.


Ensuite le fait que des faucons pèlerins aient élu domicile sur la face sud du clocher avait réjoui les superstitieux et les écologistes. Certains disaient que ces oiseaux porteraient bonheur au village tant qu’ils logeraient dans le clocher.
D’autres venaient en curieux, on les voyait, munis d’appareils photographiques allongés de téléobjectifs monstrueux, traquer les moindres mouvements de ces rapaces élégants, au vol silencieux et nonchalant, attendant de fondre sur toute proie digne de leur appétit.


Enfin la curiosité principale était le ʺvitrail du petit Jésusʺ qui, curieusement, représentait Sainte Solange, vierge et martyre, patronne du Berry, en prière avant d’être décapitée, mais le petit Jésus ne figurait pas sur ce magnifique vitrail monté au plomb et qui paraissait neuf tant les pavés de verre étaient lumineux et les joints de plomb propres et brillants.

J’essayais de me renseigner pour connaitre l’origine du nom du vitrail qui, en fait, n’avait rien à voir avec ce qu’il représentait et l’historique de son apparition dans l’église.
En effet si l’église avait été terminée environ en 1620, ce vitrail avait été posé en 1771 ; l’année était gravée sur une des colonnes de l’église faisant face au vitrail et l’inscription :
ʺMDCCLXXI DEUS FECITʺ signifiait bizarrement : Dieu le fit en 1771.


Des personnes interrogées, aucune ne sut me répondre mais toutes, sans exception, me dirent d’aller voir le Curé de la paroisse, petit saint local, charitable, disponible et très actif et qui, érudit, parlant le grec et le latin était de plus féru d’histoire.

Ah ! Quel brave curé. En échangeant une poignée de main il ne vous disait pas bonjour mais « Que Dieu vous garde car seul Il le peut et moi je vais vous bénir, c’est dans mes cordes et ça ne peut vous être que bénéfique ».
Il émanait de lui une bonté, une attention telles qu’on se sentait important à ses yeux.
J’étais entré dans l’église après la fin de sa première messe et il m’avait vu arriver, me signant après avoir pris de l’eau au bénitier et faisant une génuflexion devant l’autel de Saint Joseph ou brillait une lampe rouge indiquant la présence du Saint Sacrement.
Il m’analysa très vite. Vous êtes catholique, vous croyez en Dieu mais vous êtes loin d’être un pratiquant assidu. Vous n’irez pas en enfer pour si peu ; mais, la messe, mon fils, même si elle semble parfois ennuyeuse est toujours une occasion de regarder en soi-même face à son Créateur.
Il changea de conversation aussitôt : je ne pense pas que vous veniez me voir pour un cours d’instruction religieuse ; que puis-je faire pour vous ?
Monsieur Le Curé pourriez vous me raconter l’histoire du vitrail du P’tit Jésus ? Je vous sais occupé sur plusieurs paroisses aussi je vous invite à déjeuner ou diner avec moi, quand il vous
plaira, pour que nous puissions en parler au calme.
Je dus insister un peu pour qu’il accepte de diner avec moi le lendemain soir.


La ʺSonnerie de Corʺ était un restaurant petit mais confortable où la table avait une excellente réputation et où, en période de chasse, le gibier le mieux cuisiné de la région ainsi que les qualités de saucier du chef attiraient les gourmets et les gourmands.

Le brave curé n’avait pas d’habitude gastronomique ; il but un verre de Sancerre en apéritif et continua à l’eau. Pour les plats, Il était curieux de tout et voulant gouter à des mets variés, nous décidâmes de commander des plats différents que nous partagerions. Nous choisîmes donc quatre demi-plats pour notre plus grande satisfaction.
Au moment du bénédicité le prêtre plein d’humour transforma sa prière traditionnelle en y ajoutant à voix basse : ʺet soyez encore plus remercié, Mon Dieu, pour ce délicieux débordement de mon ordinaireʺ.
Appréciant notre diner nous parlions peu, mais avant le fromage le sympathique ecclésiastique commença son récit.


Ce n’est pas l’histoire du vitrail que je vais vous raconter mais plutôt sa légende. Elle est invérifiable mêlant des faits historiques à leur transmission orale évoluant de siècle en siècle.
Le récit prétend mettre en jeu un miracle que l’Eglise ne saurait reconnaitre mais qui est la cause d’une superstition bien assise dans l’esprit des gens de la région.


Lors de la construction de l’église on chargea un maître-verrier et ses élèves de la réalisation des vitraux.
A l’époque on taillait les verres colorés dans la masse, sur place, et on réalisait un dessin monté au plomb fondu sur un châssis que l’on plaçait dans la fenêtre correspondante.


On passait donc d’un dessin à un puzzle qui assemblé pouvait être fixé. Les pièces du puzzle étaient longues à préparer, la forme, la couleur, l’exposition à la lumière et la brillance jouaient un rôle essentiel dans la beauté du dessin.

à suivre
Je commenterai après avoir lu la suite
 
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