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Nouvelle En parlant un peu du sonnet (Suite 2)

Peniculo

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En parlant un peu du sonnet (Suite 2)

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Exemple 2 (les 2 quatrains à rimes croisées) :

Hédéra

Henri de Latouche (1785-1851)
Anna, soyez l’arbuste aux vivantes racines
Qui sur un débris mort jette un printemps nouveau
Venez parer mon deuil et verdir mes ruines
Le lierre aime un vieux chêne, un désert un tombeau.

Frais comme vous, le lierre à travers les épines
Glisse, et conquiert lui seul un antique château
Où, confondus là-bas aux mousses enfantines
Il invite à s’asseoir deux amis du coteau

Venez j’abriterai contre les vents les grêles
Vos jours, et le trésor de vos boutons si frêles
Pour de jeunes amours qu’ils fleurissent demain.

viens t’appuyer sur moi dans ta conscience altière
Quand tu devrais briser comme fait l’autre lierre
Pour t’en former un sol, le dur ciment romain.

FORME FRANÇAISE

A> Quatrains à rimes embrassées : ABBA/ABBA/CCD/EDE
B> Quatrains à rimes croisées : ABAB/ABAB/CCD/EDE
Les 2 quatrains sont identiaues= écrits sur 2 rimes A et B , l’unema=sculibe , l’autre féminine
La forme des deux tercets : 2 rimes plates, 4 rimes croiseés. =CCD/EDE
Exemple 1 > A

Salut Stéphane Mallarmé (1842-1898)

Rien, cette écume, vierge vers
A ne désigner que la coupe;
Telle loin se noie une troupe
De sirènes mainte à l’envers.

Nous naviguons, ô mes divers
Amis, moi déjà sur la poupe
Vous l’avant fastueux qui coupe
Le flot de foudres et d’hivers ;

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Une ivresse belle m’engage
Sans craindre même son tangage
De porter debout ce salut

Solitude, récif, étoile
A n’importe ce qui valut
Le blanc souci de notre toile.

Exemple 2 > B

Jolies femmes Victor Hugo (1802-1885)

On leur fait des sonnets, passables quelquefois ;
On baise cette main qu'elles daignent vous tendre ;
On les suit à l'église, on les admire au bois ;
On redevient Damis, on redevient Clitandre ;

Le bal est leur triomphe, et l'on brigue leur choix ;
On danse, on rit, on cause, et vous pouvez entendre,
Tout en valsant, parmi les luths et les hautbois,
Ces belles gazouiller de leur voix la plus tendre :

- La force est tout ; la guerre est sainte ; l'échafaud
Est bon ; il ne faut pas trop de lumière ; il faut
Bâtir plus de prisons et bâtir moins d'écoles ;

Si Paris bouge, il faut des canons plein les forts. -
Et ces colombes-là vous disent des paroles
A faire remuer d'horreur les os des morts.

SONNET IRREGULIER

Le petit traité de versification mentionne :

On parlera de sonnets irréguliers lorsque le poète modifie les quatrains, les tercets le nombre de rimes. Nous aurons donc à travers les siècles des sonnets irréguliers où seule la disposition typographique désigne encore à l’œil un sonnet.

On peut déduire que :

a) Le poète modifie les quatrains > au lieu de deux quatrains identiques (2 rimes seulement) en ABBA ; il change de rimes au second quatrain pour composer en ABBA puis CDDC : 4 rimes embrassées (ou croisées : ABAB//CDCD).

Remarque : ceux qui n’admettent pas les rimes croisées dans les deux quatrains, comptent la formule ABAB comme une modification (de la formule de base ) donnant un sonnet irrégulier.

b) Le poète modifie les tercets, deux possibilités :

1 - sizain sur deux rimes au lieu de trois CCDCCD, l’une des deux rimes se répétant quatre fois.

2- sizain à rebours sur trois rimes (quatre embrassées ou croisées + deux plates) CDDCEE ou CDCDEE.


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c) le poète modifie le nombre des rimes
un sonnet régulier compte cinq rimes (AB) pour les quatrains , (CDE) pour les tercets.
Tout autre nombre serait une modification et donnerait un sonnet irrégulier.
d) La disposition typographique (4+4+3+3) peut changer de diverse façons, voir ci-dessous..

EXEMPLES

1- Correspondances Charles Baudelaire (1821-1867)

La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles ;
L'homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l'observent avec des regards familiers.

Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

Il est des parfums frais comme des chairs d'enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
- Et d'autres, corrompus, riches et triomphants,

Ayant l'expansion des choses infinies,
Comme l'ambre, le musc, le benjoin et l'encens,
Qui chantent les transports de l'esprit et des sens.

Quatre rimes au lieu de deux aux quatrains :
Les 2 tercets forment un sizain à rebours (avec4 rimes croisées et 2 plates) > EFE/FGG

2- Madrigal. François de Malherbe (1555-1628)



Ma Crisante avec une foi
Dont l'âge atteste l'innocence,
M'a fait serment qu'en mon absence
Elle aura mémoire de moi.

Cette faveur si peu commune
Me donne tant de vanité
Qu'à la même divinité
J'ose comparer ma fortune.

Peut-être qu'elle me déçoit
De m'assurer que cela soit,
Mais si le tiens-je véritable

Pour me garantir du trépas
Qui me serait inévitable,
Si je croyais qu'il ne fût pas.

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Les deux quatrains ne sont pas identiques ( 4 rimes ABBA/CDDC)

3- Á un fondateur de ville. J-M de Heredia (1842-1905)

Las de poursuivre en vain l'Ophir insaisissable,
Tu fondas, en un pli de ce golfe enchanté
Où l'étendard royal par tes mains fut planté,
Une Carthage neuve au pays de la Fable.

Tu voulais que ton nom ne fût point périssable,
Et tu crus l'avoir bien pour toujours cimenté
A ce mortier sanglant dont tu fis ta cité ;
Mais ton espoir, soldat, fut bâti sur le sable.

Carthagène étouffant sous le torride azur,
Avec ses noirs palais voit s'écrouler ton mur
Dans l'Océan fiévreux qui dévore sa grève ;

Et seule, à ton cimier brille, ô Conquistador,
Héraldique témoin des splendeurs de ton rêve,
Une Ville d'argent qu'ombrage un palmier d'or.

Les 2 tercets forment un sizain à rebours (avec 4 rimes croisées + 2 plates)>CDD/CEE.

4- Le châtiment de Tartufe. Arthur Rimbaud.(1854-1891)

Tisonnant, tisonnant son cœur amoureux sous
Sa chaste robe noire, heureux, la main gantée,
Un jour qu'il s'en allait, effroyablement doux,
Jaune, bavant la foi de sa bouche édentée,

Un jour qu'il s'en allait, " Orémus ", - un Méchant
Le prit rudement par son oreille benoîte
Et lui jeta des mots affreux, en arrachant
Sa chaste robe noire autour de sa peau moite !

Châtiment !... Ses habits étaient déboutonnés,
Et le long chapelet des péchés pardonnés
S'égrenant dans son coeur, Saint Tartufe était pâle !...

Donc, il se confessait, priait, avec un râle !
L'homme se contenta d'emporter ses rabats...
- Peuh ! Tartufe était nu du haut jusques en bas !

Les 2 quatrains sont différents ABAB/CDCD
Les deux tercets sont sur trois rimes plates EE FF GG.
 
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